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Est-ce possible d'enseigner dehors sans accès à la nature?

Auteur(e)s : Amandine Caudron, enseignante, école Saint-Paul (Gatineau)

Est-ce possible d'enseigner dehors sans accès à la nature?

Ma réflexion

L’enseignement dehors est souvent mis de l’avant au travers de la pédagogie par la nature dont l’un des objectifs premiers est de contrer le déficit nature et de s’approprier un espace naturel.

Difficile à justifier lorsqu’on est en ville dans une cour d’école entre un mur et un grillage avec seulement quatre jeunes arbres qui tentent de s’implanter dans la cour! Quatre arbres attendus pendant trois ans après la mise en place d’une mesure de verdissement… et auxquels il ne faut surtout pas toucher pour leur donner une chance de pousser.

À cela s’ajoute les contraintes de « l’aire COVID » qui nous limite, en zone rouge (soit l’alerte maximale) au terrain de l’école et ne nous permet pas d’explorer un coin de quartier ou de bénéficier d’un parc urbain.

Dans un contexte tel que celui-ci, un sentiment de frustration, peut nous habiter. Comment enseigner dehors, malgré tout ?

Étant convaincue de nature (petit jeu de mots), j’ai toujours voulu prendre le taureau par les cornes : identifier la problématique et trouver des solutions.

En effet, je suis convaincue que les enfants ont besoin de sortir plus que 20 minutes chaque matin. Alors quoi de mieux que de sortir à la rencontre de l’air frais plutôt que d’en faire entrer un peu en ouvrant les fenêtres trois fois par jour pour tenter d’évacuer les microbes qui prennent un malin plaisir à se blottir en classe!

Bref, voici quelques idées non exhaustives qui, je l’espère, pourront vous inspirer.

Au primaire, selon les apprentissages du moment : il est toujours intéressant d’identifier son intention pédagogique et de se questionner sur le comment on compte la mettre en place. Dans une cour d’école, si on mise sur la pédagogie par le jeu et l’activité physique ce sont déjà deux tremplins à la création d’une activité qui peut être simple et motivante pour les enfants à l’extérieur.

Par exemple, j’enseigne le nom et le déterminant : on joue à la tag, une équipe est l’équipe des déterminants l’autre est l’équipe des noms communs. Lorsqu’ils s’attrapent, ils vérifient si les accords fonctionnent entre eux, si c’est le cas, ils gagnent et vont écrire leurs réponses sur une ardoise et viennent chercher un nouveau déterminant et un nouveau nom.

Les noms communs utilisés peuvent être issus d’une activité faite au préalable au milieu de la cour, les enfants devaient noter tous les noms communs qu’ils voyaient autour d’eux.

Au préscolaire, dans notre cour qui n’a qu’un carré de sable à moitié remplit; on peut faire manger les enfants autour de celui-ci ou sur une bâche. S’il pleut légèrement, on peut installer une bâche dans un coin de la cour pour que les enfants soient à l’abri.

Par la suite, je sors mes ateliers sur des bâches (selon la météo) ; blocs de bois, legos, poupées en plastique, voitures, casseroles, bols en métal (vive les ventes de garage)… et pour couronner le tout et en toute saison, on donne accès à de l’eau. Pour la gestion, on peut remplir une bouteille d’eau réutilisable (par exemple des bouteilles de liqueur).

Les enfants confectionnent ensuite toutes sortes de plats, imaginent toutes sortes d’idées selon les saisons et ce qu’ils trouvent autour d’eux. Ils ont même « fabriqué de l’eau » en mélangeant de l’eau et de la neige. Ils font de la science sans s’en rendre compte! C’est fantastique!

On peut aussi faire des boules de neige et créer des parcours pour développer la motricité globale…

Bref les ateliers, favorisent par le fait même le jeu libre et permettent de susciter la curiosité, la collaboration, l’entraide, l’imagination, la découverte… Donc répondent aux compétences du préscolaire et favorisent le développement de l’enfant.

Il est certain que la gestion du matériel demande une certaine organisation et une implication de la part de l’enseignant. Mais lorsque les enfants sont habitués, ils sont toujours prêts à aider et ils sont fiers de rapporter les bacs. Le nettoyage, les enfants s’y donnent à cœur joie. Une poupée sale : on lui donne un bain. Une voiture sale : on l’amène au lave-auto… Bref, tout problème a une solution amusante.

Pour terminer, tout comme au primaire, les mathématique et la conscience phonologique peuvent être initiés par le jeu et l’éducation physique pour favoriser les apprentissages, cerceaux, ballons, course aux mots… bref c’est possible.

Avec une routine bien installée, les enfants sont habitués et participent avec plaisir.

J’espère que ce partage vous permettra d’avoir une perspective différente sur les possibilités d’apprentissages qui peuvent être faites à l’extérieur.

Je vous souhaite beaucoup de plaisir dans vos créations pédagogiques.

J’y ai goûté et je ne peux plus m’en passer!

Amandine Caudron, enseignante, école Saint-Paul (Gatineau)

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